Guernesey, 5 sept[embre] [18]72, jeudi matin, 6 h. ½
Te voilà déjà au travail mon cher bien-aimé, et après une bonne nuit je l’espère. Cependant j’ai une vague crainte que l’absence de Petite Jeanne n’ait été une cause de non sommeil pour toi. Je serais bien heureuse de me tromper et d’apprendre de toi-même que tu as dormi comme un noir. Quant à moi je n’ai besoin d’aucun prétexte ni de personne pour passer de mauvaises nuits. Elles se produisent d’elles-mêmes et spontanément et bientôt je pourrai me dispenser de me coucher. En attendant je ne peux pas m’empêcher de trouver la prétention de Mme d’Alton un peu indiscrète à moins cependant que tu ne sois allé au-devant de son désir, ce qui expliquerait du reste sa demande et ta réponse. Tu es assez riche pour payer des bouquets à toutes les Chloris [1] qui t’en demanderonta. Quantb aux vieilles jeannetonsc [2], on leur en coite [3] comme dirait la littéraire Suzarde. Donc, accorde ta lyre et pince-nous tout ce qu’il te plaira nous serons toujours trop heureux d’écouter et d’admirer voired même d’enrager. Je t’aime.
BnF, Mss, NAF 16393, f. 246
Transcription de Bulle Prévost assistée de Florence Naugrette
a) « demanderons ».
b) « quand ».
c) « jannetons ».
d) « voir ».