Bruxelles, 13 août [18]68, jeudi matin, 7 h.
Bonjour, mon cher bien-aimé, comment ta nuit ? Aussi bonne que la mienne, je l’espère. Je viens de m’apercevoir que j’ai oublié de te donner tes lunettes hier ou plutôt que je n’ai pas eu le temps de te les rendre, pressé que tu étais de retourner chez toi. J’aurais mauvaise grâce à me plaindre de ton activité dévorante mais je ne peux pas m’empêcher d’en être essoufflée pour toi et tourmentée pour moi car il est impossible que tu n’en sois pas un jour ou l’autre fatigué et malade. Cette perspective ne me fait pas rire et je donnerais tout au monde pour te voir prendre un peu de repos et de quiétude au risque de faire sécher sur pied tous les libraires et tous les éditeurs et éditeuses des quatre parties du monde. Malheureusement je ne peux rien ni pour, ni contre ton travail incessant. Ma fonction se borne à t’aimer et Dieu sait si je m’en acquitte avec conscience. Je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 222
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette