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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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2 mai 1840, samedi soir, 4 h. ¾

Bonjour mon Toto bien-aimé, bonjour mon pauvre petit homme. Vous avez été bien bon, bien suave, bien [illis.] et surtout bien beau et bien ravissant ce matin, mon amour, j’aurais voulu baiser vos pieds mais j’ai craint de mettre le feu à l’imagination de ces petites péronnelles et je me suis retenue. J’ai t-y bien fait mon maîte ? – Réponse : oui, grosse bête [1]. Lanvin est venu chercher Claire à 4 heures mais ce n’était pas lui qui devait la conduire ; Mme Lanvin qui va un peu mieux veut essayer ses forces en faisant cette sortie de sorte qu’il fallait aller la chercher chez elle et puis retourner chez Pradier. Bref, je crains fort qu’elle en soit pour la peine et que ce soit encore une occasion perdue pour ma pauvre Claire. Je sais bien que la pauvre femme le fait pour un bon motif : c’est-à-dire pour tâcher d’avoir une robe à Claire parce que l’habitude de traiter avec Pradier lui donne plus de chance de succès mais je te le répète je crois qu’elle en sera pour sa peine et qu’elle ne la trouvera pas. Enfin au petit bonheur et baise-moi. J’ai écrit tout à l’heure à Jourdain de venir enlever le tapis mardi prochain de midi à 1 h. Ce qui ne t’empêche déjeuner avec moi ce jour-là si tu peux. Jour Toto. Jour mon petit o, je suis très contente que ce soit toi qui aies dessiné le petit chiffre que Claire doit broder, cela me fera trouver la chose ravissante et il ne fallait rien moins que ça pour me faire admirer les bourrats de ma fille. Bonjour Toto, bonjour mon petit o. Si vous n’êtes pas trop fatigué ce soir et si vous ne travaillez pas je vous prierai de me faire sortir un peu. En attendant je vais tirer l’aiguille et penser à vous de tout mon cœur et de toute mon âme. Jour Toto. Oh si nous pouvions avoir la soupièrea. J’ai tout sacrifié à l’expression des personnagesb et la soupièrea est un peu moins bien réussie que l’autre fois [2], mais vous pouvez juger malgré cela de l’effet merveilleux qu’elle ferait sur mon tapis turc et sur ma table ronde.

Juliette

BnF, Mss, NAF, 16342, f. 99-100
Transcription de Chantal Brière

a) « soupierre »
b) Un dessin représente Hugo et Juliette face à face de part et d’autre d’une table recouverte du tapis turc et sur laquelle trône une soupière. De la bouche de chaque personnage sort l’exclamation « quel bonheur !!! » et l’ensemble est accompagné d’une légende : « Toto en extase, Juju poussant des Zurlements. Quel bonheur !!! ».

© Bibliothèque Nationale de France

Notes

[1Juliette emprunte ces répliques « Ai-je bien fait, mon maître ? – Oui, grosse Juju. » à une chanson populaire « Préchi, précha » : « Est-ce bien fait mon maître ? Oui, ma grosse bête ». Il existe différentes variantes de cette chanson. Mais elle écrit « not’ maîte », réplique de comédie imitant le parler paysan.

[2Voir lettre du 26 avril 1840 au matin.

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