Paris, 5 juin 1881, dimanche matin, 7 h.
Puisqu’il faut que j’attende à tantôt pour savoir si ta nuit a été comme je le désire, mon cher bien-aimé, je fais de nécessité vertu en la supposant bonne. J’espère que cette témérité ne sera pas déçue et que je n’aurai qu’à te féliciter quand je te verrai. Jusque là, je garde ma joie.
Je viens de m’assurer qu’il n’y aura pas de séance avant jeudi prochain à deux heures. Il paraît aussi, hélas ! que le groupe là-haut prendra la clef des champs aujourd’hui pour toute la journée. Tout attristéa qu’en sera notre dîner, et notre soirée, je ne peux pas m’empêcher de les approuver dans l’intérêt de leur santé et de leur plaisir à tous. Donc qu’ils s’amusent, qu’ils se portent bien et qu’ils soient heureux, c’est ce que je leur souhaite, dussions-nous en avoir tout l’ennui. D’après ce que je vois ce matin, je crains qu’il ne nous soit pas possible d’avoir de voiture tantôt. Quant à la ressource de l’omnibus, je te supplie de n’en pas user pour moi car ce serait une véritable torture que tu m’imposerais par ce temps de foule, de chaleur et de poussière. J’espère que tu me l’épargneras et que je pourrai t’aimer tranquillement à l’ombre, ici, en lisant les comptes rendus des journaux de ton divin livre [1].
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16402, f. 122
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette
a) « attristée ».