27 août 1879

Paris, 27 août [18]79, mercredi matin, 8 h ½.

Dors, mon pauvre grand bien-aimé, puisque ta nuit n’a pas encore été bien complète^a cette fois ; tâche de rattraper le sommeil perdu par une grasse matinée bienfaisante et douce. Moi, pendant ce temps-là, je vais préparer tout ce qu’il faut pour notre petite villégiature de quinze jours [1]. Je dis quinze jours parce que je pressens que Vacquerie ne démordra pas de sa cordiale ambition qui est que tu lui fasses à lui le même honneur et le même bonheur qu’à Meurice. Ayant le même dévouement et la même amitié il est juste qu’il ait^b le même droit et la même faveur. Il y compte, d’ailleurs, et tu es trop bon pour lui faire, sans une sérieuse nécessité, cette injuste rebuffade, tu ne le voudras pas.
La lettre mensuelle de M^me Chenay est arrivée ce matin. Elle s’est croisée avec la tienne qu’elle a dû recevoir aujourd’hui probablement. J’ai remis à Lesclide le paquet de lettres qui t’a fait reculer^c d’horreur hier. Il les rapportera classées tantôt avant cinq heures et tu pourras lui expliquer à nouveau ce que tu désires qu’il fasse à ce sujet pendant ton absence.
Je vais écrire à Louis Leroy pour l’informer de notre petit voyage afin qu’il ne se casse pas le nez demain en venant pour dîner avec nous comme d’habitude. Moi je ne renonce pas, comme d’habitude, toujours et partout, à t’aimer de toute mon âme.

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF 16400, f. 212
Transcription d’Apolline Ponthieux assistée de Florence Naugrette

a) « complette ».
b) « est ».
c) « reculé ».