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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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5 août 1863

Guernesey, 5 août [18]63, mercredi matin, 7 h. ¼

Bonjour, mon grand petit bien-aimé, bonjour, et puisses-tu avoir passé une vraiment good nuit. À cette condition je pardonne à mon insomnie et je souris aux grimaces de mon rhumatisme. Voilà le temps bien gâté, mais cela est nécessaire, non pas pour les voyageurs, mais pour les haricots et les concombres, voire même pour les rhumatismes. Il est vrai que nous ne sommes pas encore en route et que tout peut s’apaisera d’ici là. En attendant nous avons eu la PRIMEUR d’une VERY GOOD LETTER au Phare de la Loire [1] qui ne manquera pas de faire une bonne petite trouée dans les œuvres vives du citoyen Boustrapa. Si je savais parler politique, je t’en dirais long là-dessus, mais je me tais, [sinon  ?] par prudence, par ignorance. Tu as oublié de remporter la copie de Mme Chenay hier au soir, mais je t’y ferai penser ce matin en même temps que je te remettrai tous les journaux. Suzanne ne se sent pas de joie du retour inespéré de son chat qui a dû, la pauvre bête, se trouver enferméb par hasard dans quelque [écurie  ?] ou magasin. Moi-même j’ai un petit poids de tristesse de moins sur la conscience depuis que ce pauvre Fouyou est [illis.]. Voilà comme nous sommes, nous autres mères Michel [2] : tout cela n’empêche pas le matou Marquand de miauler en guernesiais contre les ardeurs intempestives du PAS CHAT KESLER et de tâcher de lui mettre un peu de griffe dans l’œil faute de mieux. Moi, voyant le manège, je ne m’y suis pas prêtéec et je l’ai pris à rebrousse-poil, parce que je voyais, sous ses semblants de sollicitude, la douce queue de la perfidie et que rien ne m’est plus antipathique. Mais quelle chienne de RESTITUS à propos de chat ! C’est bien la peine [illis.] aimer comme une lionne pour vous le dire comme une bécasse.

J.

BnF, Mss, NAF 16384, f. 208
Transcription de Gérard Pouchain

a) « appaiser ».
b) « enfermer ».
c) « prêté ».

Notes

[1Le 4 août, Victor Hugo a adressé une lettre au directeur du Phare de la Loire. Le journal qui avait dû suspendre sa publication pendant deux mois sur décision de la censure impériale, va reparaître le 9 août : dans ce numéro est reproduite la lettre de Victor Hugo.

[2Allusion à la comptine « C’est la mère Michel qui a perdu son chat », popularisée dans les années 1820.

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