Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1849 > Mars > 25

25 mars 1849

25 mars [1849], dimanche matin, 7 h.

Bonjour, mon amour, que la paix et le bonheur soient avec toi et avec tous ceux que tu aimes. Comment es-tu revenu hier au soir ? Avais-tu pris quelques précautions contre le froid et contre la neige ? Tu sais combien il serait dangereux d’être pris par quelque indisposition dans ce moment-ci ? Je te recommande donc, mon amour, d’être prudent et de ne pas jouer ta santé et ta vie avec la facilité que tu y as misea jusqu’ici. Songe que ta santé m’est aussi chère que ton amour ; ma sollicitude va de l’une à l’autre pour les recommander au bon Dieu. Je donnerais la moitié de ma vie pour te préserver de tout mal et l’autre moitié pour que tu n’aimes jamais d’autres femmes après moi. De tous ces désirs, aucun ne peut être satisfait par ma seule volonté. Il faut que ton concours et celui du bon Dieu me viennent en aide. C’est à toi de commencer en ayant bien soin de ton cher petit corps et en ne recherchant pas trop les conquêtes de femmes, même celles qui n’ajouteraient rien à votre gloire de Don Juan. Maintenant, mon petit Toto, il me tarde de savoir comment tu vas et quand je te verrai. Mon impatience s’est éveillée en même temps que moi et je sens qu’elle ne restera pas inactive, à me tourmenter jusqu’à ce que tu sois auprès de moi. En attendant, je t’aime de toute mon âme et je te baise de tout mon cœur.

Juliette

MVHP, MS a8172
Transcription de Michèle Bertaux et Joëlle Roubine

a) « mis ».


25 mars [1849], dimanche midi

Tu as dû recevoir tes deux petits miroirs, mon Toto, parce qu’il était convenu qu’on te les porterait à 11 h ½ ce matin ? Maintenant, est-ce que tu ne penses pas à venir bientôt ? Tu as cependant un bien grand arriéré à me payer rien que pour cette semaine où je t’ai à peine vu. Cher adoré, mon bon petit homme, mon amour, je sais que tu ne t’appartiens pas. Je ne veux pas te tourmenter, je te dis seulement combien je t’aime et combien je serais heureuse de te voir. Tu n’as pas eu froid hier ni les pieds mouillés. Tu ne saurais croire comme je suis tourmentée quand je te sais hors de chez toi pendant ces affreux temps. Je te connais si insouciant de ta propre conservation que je ne peux pas m’empêcher d’être très inquiète. Hier au soir, cette bonne Mme Sauvageot m’a envoyé deux litres de camphre. Ce n’est pas à dédaigner par le temps de choléra qui court et en particulier pour l’infection permanente de ma hideuse maison. Hier, on a lavé à la lessive bouillante toute la maison depuis le haut jusqu’en bas. On a fait des fumigations de toutes sortes et l’odeur persiste et devient plus forte que jamais. Je crois qu’il faudrait sonder les conduits du lieu et s’assurer qu’il n’y a rien dedans. Du reste, impossible de voir ni le propriétaire ni son gérant. Tout cela a l’air d’être abandonné au premier venu. Quant à moi, si j’avais pu me douter de tous les inconvénients de ce logis, je ne l’aurais certainement pas pris. Maintenant j’y suis, il faut que j’y reste et que je tâche d’y vivre si c’est possible. Pour m’y aider, je t’aime de la force de quarante milliards de chevaux et je te baise partout.

Juliette

MVHP, MS a8173
Transcription de Michèle Bertaux et Joëlle Roubine

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne