Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1870 > Décembre > 2

Paris, 2 déc[embre] 1870, vendredi matin, 9 h.

Cher bien-aimé, j’espère que tu auras pu dormir malgré les terribles préoccupations du moment. Quant à moi cela ne m’a plus été possible à partir de trois heures du matin à cause des tambours et des clairons battant le rappel ou sonnant la diane [1]. Ce tapage se complétait du bruit des troupes chantant à tue-tête tous les refrains patriotiques de la grande Révolution. Puisse cet entrain ne pas les quitter sous le feu de l’ennemi et le Deux Décembre, de sinistre mémoire, se réhabiliter en les couvrant de gloire aujourd’hui. Je voudrais déjà être à ce soir pour connaître le résultat de la journée afin de m’en réjouir avec toi ou de te demander du courage pour supporter un nouveau désastre. J’ai les nerfs si agités que je peux à peine tenir ma plume. De plus je me suis foulé le pouce de la main gauche hier après t’avoir quitté [2]. Ce pauvre pouce avait déjà été fort estropié à Jersey mais cette fois je crois que c’est définitif car il ne veut plus me servir. J’ai oublié de redire à Mariette d’apporter un de tes gilets pour pouvoir acheter à coup sûr la quantité qu’il faut pour en faire quatre ; mais j’espère que d’elle-même elle se souviendra de la commission que je lui ai donnée hier. Ce soir je te ferai penser à me donner de l’argent pour payer demain matin la note de l’hôtel [3]. Jusqu’à présent je suffis à notre chauffage avec un seul panier de bois par jour mais il ne faudrait pas que le froid augmentât, autrement nous souffririons. Je t’en donne avis pour que tu y avises si tu peux et je t’adore.

MLVH Bièvres, 130-8-LAS-VH 2 a, b et c
Transcription de Gérard Pouchain

Notes

[1Sonner la diane : en langage militaire, sonner le réveil.

[2« Elle s’est foulé le pouce. J’espère que ce ne sera rien. Émile Allix l’a pansé. » (Victor Hugo, Carnet, 2 décembre 1870).

[3Depuis la veille, Juliette Drouet est installée au Pavillon de Rohan, où est Charles, 172 rue de Rivoli.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne