Guernesey, 2 août [18]64, mardi, 1 h. après-midi
Cher, cher, cher bien-aimé, je te souris et je m’applique le plus que je peux à me bien porter. Ce n’est pas tout à fait sans peine car cette nuit, et une bonne partie de la matinée, j’ai eu à lutter contre ma douleur de côté qui essayait de refaire son invasion périodique mais j’ai tenu bon et elle a été pour ses frais sournois et méchants. J’espère que cette leçon la découragera et que je n’en entendraia plus parler d’ici à longtemps.
Maintenant que le moment du départ approche je te prierai de me laisser faire mes préparatifs tout doucement pendant les quelques jours qui nous restent. Je ne suis plus assez alerte pour rien faire le soir après le dîner et la matinée est employée presque toute entière aux soins de la maison. Je n’ai donc que l’après-midi pour régler et mettre en ordre notre sac de nuit et le reste. Si je continuais à me laisser aller aux douceurs de la promenade nous arriverions au dix août [1] sans avoir rien de prêt. Il faut donc que toi et moi nous ayons le courage de nous priver de promenade d’ici-là pour avoir le bonheur de nous en donner à cœur joie après.
BnF Mss, NAF 16385, f. 205
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Florence Naugrette
a) « je n’en n’entendrai ».