Paris, 22 mai [18]77, mardi matin, 10 h. ½
Dites doncque, citoyllien, il me semble que vous prenez goût aux empereurs [1] ? Mais soylliez tranquille je veille au grain et je garde mes armes. Eh bien, redites doncque, si c’est comme ça que vous découragez les portes-couronnes, vous êtes encore un fier démagogue, vous ! Heureusement qu’il y a encore des guillotines au service de la République et j’en userai, je ne te dis que ça ; mets-le dans ton journal ! Et dire qu’il va falloir héberger ce César brésilien comme un simple homme ! Vrai, c’est à se mettre les cinq doigts et le pouce dans l’œil pour ne pas voir ce spectacle écœurant, abrutissant et navrant. Oh ! là là là qué malheur ! Heureusement que j’ai pu vous pincer un honnête autographe hier, qui est mon honneur, ma gloire et mon bonheur, avant votre abjection d’aujourd’hui. Je ne sais vraiment pas comment je m’y serais prise pour le lire et pour le baiser comme je l’ai fait, même avec le secours des pincettes. C’est égal, vous êtes un fier gueux [2] et votre empereur aussi.
BnF, Mss, NAF 16398, f. 138
Transcription de Guy Rosa
[Blewer]