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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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19 août, vendredi matin, 8 h. ¾

Bonjour mon Toto bien aimé. Bonjour mon cher adoré. Comment vas-tu ? Comment va Toto le COURONNÉ ? Vous êtes bien revenu TOUT DE SUITE me donner mon bain de pied [1]. Voime voime, si j’en avais eu bien besoin j’aurais été servie au doigt et à l’œil AVEC UNE PIPE ET DES BAS ROUGES. Tout cela n’empêche pas les sentiments, à ce qu’il paraît, et je dois être très contente. Pour me tenir compagnie, j’ai fait des rêves affreux cette nuit. J’ai eu deux ou trois cauchemars les uns sur les autres. Pour me consoler j’ai toute la journée d’attente et d’impatience jusqu’à ce que vous veniez, mais je n’en serai pas moins très heureuse si vous venez et si vous êtes guéris. Je dis guéris au pluriel parce que je sais que la santé de ton enfant passe avant la tienne [2], mon pauvre amour, et que tu ne serasa tranquille que lorsque ce cher petit sera tout à fait en bonne santé. Voilà un temps qui doit lui être aussi très favorable à ce pauvre petit. Je le supporte dans cetb espoir. Tâchez de le mettre à profit mes chers petits amis. Jour Toto. Jour mon cher petit o. Voici vos histoires de concours et de prix [premiers  ?]. Est-ce que je n’aurai pas un peu mon tour ? Est-ce que je n’aurai pas le plus petit fricandeau relié en veau pour prix d’embêtage, la moindre matelotte pour prix d’honneur [3] ? En vérité, c’est bien le moins après cette année aussi absurde, d’avoir un pauvre petit brimborion de bonheur à mettre dans ma collection d’œuvres incomplètes.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16350, f. 73-74
Transcription de Laurie Mézeret assistée de Florence Naugrette

a) « sera ».
b) « cette ».


19 août [1842], vendredi après-midi, 3 h.

Je vous attends toujours, mon petit bien-aimé, vous seriez bien gentil de venir, ne fût-cea qu’un tout petit moment. Cela me donnerait du courage pour le reste de la journée. J’ai beau me morigéner, j’ai beau faire et beau dire, je trouve toujours ma vie fort triste et fort maussade et je la donnerais bien pour deux sous à qui voudrait la prendre. J’ai cependant eu pour me récréer la vue de la GARRIGUE en fleurs BLANCHES PANACHÉES de culs de bouteilles, plus la musique des ânes savants [4]. Mais cela ne m’amuse pas assez. J’aimerais mieux autre chose avec vous. Voici un peu de pluie. Si cela pouvait rafraîchir le temps, sans vous faire de mal, mes chers petits blaireux, je serais très contente, PHYSIQUEMENTb PARLANT. Maintenant, je suis à bout de mon esprit inventif et de mon style ébouriffant, je n’ai plus rien à dire et je devrais m’arrêter ici. Mais vous n’êtes pas homme à me faire grâce d’une page, non pas que vous y teniez autrement, mais parce que vous voulez être sûr que j’ai employé mon temps. Eh ! bien, mon Toto, je vais gribouiller ce reste de page blanche comme je pourrai, me réservant pour la fin ce qui occupe toutes mes pensées, ce qui motive toutes mes actions, ce qui remplit mon cœur, ce qui est tout mon souci, toute ma joie et toute ma vie, ce qui ne tiendrait pas dans le monde tout entier et ce qui tient dans un tout petit mot : l’amour.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16350, f. 75-76
Transcription de Laurie Mézeret assistée de Florence Naugrette

a) « fusse ».
b) « phisiquement ».

Notes

[1Juliette s’est cogné le pied et blessé il y a quelques jours.

[2François-Victor Hugo se remet d’une grave maladie pulmonaire.

[3Juliette plaisante ici sur la cérémonie de remise de prix à Charles Hugo à laquelle Victor Hugo a assisté les jours précédents.

[4À élucider.

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