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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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8 février [1838], jeudi après-midi, 1 h.

Cher petit homme bien-aimé, il m’a fallu attendre du papier pour vous écrire, vous aviez usé tout mon mien hier au soir, pauvre petit homme adoré. Je ne vous ai pas revu depuis hier au soir, qu’une petite minute, tout à l’heure, tout cela pour me gagner de l’argent, et pour comble de joie et de bonheur, cet argent est dépensé avant d’être gagné. Il faut bien de l’amour pour supporter cet état de chose, de l’amour des deux parts car je ne prétends pas rabattre rien du mérite que tu as à m’aimer comme tu le fais. Mais moi j’ai bien aussi quelque mérite à tant accepter de toi. Encore, si je pouvais t’être bonne à quelque autre chose qu’à t’aimer, mais je ne suis bonne à rien et je me désole et je te plains car je ne prévois pas avec ton courage quand cela finira. Mon cher adoré, ce ne sont pas des doléances banales que je te dis là, ce sont les expressions les plus vraies et les plus senties par mon cœur et par mes entrailles. Je souffre de voir ce que te coûte de fatigue et d’ennui l’argent que tu me gagnes. Je voudrais trouver un moyen de vendre quelque chose, je n’ose pas dire à ton insua puisque tu ne le veux pas et que je te fâcherais, mais vendre, de ton consentement, quelque chose, si tu voulais nous le trouverions bien, et si tu m’aimais comme je t’aime, tu ne me refuserais pas cette petite satisfaction. Ça serait si doux pour moi de t’aider à porter le lourd fardeau. Tu devrais bien y consentir, mon adoré. Je t’aimerais encore plus si c’est possible.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16333, f. 57-58
Transcription de Marie Rouat assistée de Gérard Pouchain

a) « insçu ».


8 février [1838], jeudi soir, 7 h. ¼

Je ne veux pas dîner, mon cher petit homme, avant de vous avoir adressé mon bénédicité. Je vous aime, mon Toto chéri. Je vous trouve très beau, mon Toto bien-aimé, et vous êtes très grand, mon Toto adoré. Je voudrais seulement que vous vous fassiez un peu moins de bosses à la tête et un peu plus dans le tête à tête avec moi. Ce jeu de mots qui vous paraît peu intelligible est cependant plein de malice et de sel. Seulement il est gazé, ce qui l’empêche de paraître dans tout son éclat. Dites donc, mon petit homme chéri, est-ce que vous ne reviendrez plus qu’à minuit ? C’est bien long. D’ici là, j’aurai eu le temps de dévorer et de digérer le petit brin de bonheur que vous venez de mettre dans mon ratelier. Je vous préviens que j’ai déjà faim et que j’ai toujours soif. Vous ne me donnez plus à boire, ça n’est pas étonnant. Et si j’allais enrager ? À qui serait la faute, je vous prie ? D’abord je vous préviens que si cela arrive, je ne mords que vous et partout encore. Ainsi, gare. Je sens déjà que ça me vient, ça me monte, hum…. Quel bonheur !

Juliette

BnF, Mss, NAF 16333, f. 59-60
Transcription de Marie Rouat assistée de Gérard Pouchain

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