Guernesey, 2 septembre 1860, dimanche matin, 8 h. ½
Je ne te dis plus bonjour, mon cher bien-aimé, puisque déjà nous nous le sommes dit tous les deux du cœur, des yeux, et des mains à travers l’espace. Te voilà sur pied de bon matin, mon cher petit homme. J’espère que cela ne veut pas dire insomnie et mauvaise nuit comme pour moi qui me suis levée plus tard que d’habitude et qui n’ai peut-être pas dormi 3 h. en toute la nuit. Du reste je ne suis pas malade mais seulement un peu agitée. Et pourvu que tu te portes bien, toi, je suis contente et heureuse à la façon de Suzanne : COMME LE NEZ AU MILIEU DU VISAGE. Il fait un temps ravissant depuis hier. Il serait bon que le beau temps nous fît la FARCE de venir au moment, où, d’habitude il s’en va. Quant à moi je lui permets cette rentrée inattenduea pourvu qu’elle dure trois ou quatre mois. En attendant tu feras bien de me donner de la COPIRE et de la collation TOUT PLEIN MOI, toujours à la mode de Suzanne, qui est la BONNE avec et sans coq-à-l’âne. Il [me semblait ?] que tu allais venir tout de suite, mon cher petit homme, en te voyant tout habillé tout à l’heure. Il parait que je me suis trompée, puisque j’ai eu le temps de griffouiller toutes ces niaiseries en t’attendant. J’espère que tu ne peux pas longtemps tarderb à moins que tu ne préfères travailler chez toi. Justement te voilà. Quel Bonheur !!!!!!c
BnF, Mss, NAF 16381, f. 230
Transcription d’Amandine Chambard assistée de Florence Naugrette
a) « inatendue ».
b) « tardé ».
c) Juliette fait courir les points d’exclamation jusqu’au bout de la ligne.