Guernesey, 21 déc[embre] [18]72, samedi matin, 8 h. ¾
Je suis toute triste, mon cher bien-aimé, que tu aies pris la peine de t’exposer à cette vilaine pluie tout à l’heure sans que j’en aie profitéa, occupée que j’étais à donner des ordres à Suzanne pour le marché. Chaque fois que ce guignon m’arrive j’en ai un véritable chagrin jusqu’à ce que je t’aie vu. Cette consolation m’arrivera tard maintenant que tu as pris le parti de déjeuner dans ton Lucout tous les jours. Je tâcherai de prendre patience en t’aimant avec rage jusque-là. Mais c’est égal, je ne suis pas contente. Pendant que j’y pense, dans le cas oùa Marquand viendrait ce soir et où il te conviendrait de l’inviter à dîner, il ne faut pas oublier que tu as donné congé à mes deux servantes le mercredi et le jeudi de la semaine prochaine. Quant à réunir l’abbé Boone et Garnier ou Marquand, cela ne pourrait être qu’un des jours non fériés ou de maigre. Maintenant que je t’ai renseigné, tu feras tes invitations quand et comme tu voudras et c’est bien le moins. Et toujours de la pluie ! Heureusement c’est aujourd’hui que nous finissons la série des jours courts. Cette pensée me remet le cœur au ventre tout en me laissant mon mal de tête et ma stupidité. J’espère que tu auras de bonnes nouvelles de ton groupe [1] et de Meurice aujourd’hui et dont tu me laisseras prendre ma part, comme toujours. Merci d’avance et amour immuable.
BnF, Mss, NAF 16393, f. 351
Transcription de Bulle Prévost assistée de Florence Naugrette
a) « j’en ai profité ».