Guernesey, 31 mai [18]68, dimanche matin, 7 h.
Je t’envoie ma bonne nuit dans un baiser à charge de revanche si tu es en fondsa de ces deux choses ce matin. Le temps continue d’être merveilleusement beau quoique un peu trop chaud pour moi, ce qui nous promet une ravissante promenade pour tantôt. Sans compter l’espoir du collationnement demain : quel bonheur !!! Je te remercie d’avoir ajourné la corvée du GREAT MODERN [1] à trois semaines et surtout d’en faire tous les frais chez toi. Tu ne peux pas te figurer quelle fatigue et quel ennui tu m’épargnes en te sacrifiant toi-même en cette occasion. Ça n’est pas très généreux à moi d’en user mais c’est bien bon, bien doux, bien charmant et bien tendre à toi de le faire et je t’en remercie encore de nouveau. Quand tu écriras à ton Victor [2], aie la bonté de lui dire ma reconnaissance attendrie pour le second, cher et triste petit portrait du pauvre petit ange absent [3]. Puisse-t-il revenir bien vite aussi beau, aussi doux, aussi bon et aussi intelligent qu’auparavant et avec la volonté de ne plus nous quitter jamais. C’est la prière que je lui fais pour qu’il la transmette à Dieu que j’adore à travers toi et lui.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 151
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « si tu es en fond ».