Paris, 3 avril 1881, dimanche matin, 9 h.
Je ne saurais trop te recommander, mon grand adoré, de te tenir très chaudement quand tu sortiras du lit car il fait un temps exceptionnellement froid ce matin. On dit, et je le crois, qu’il a gelé à glace cette nuit. Raison de plus pour te défendre contre ce revenez-ya d’hiver puisque ton rhume commence à s’amender. J’ai été assez satisfaite de ta nuit et j’espère que la journée sera meilleure encore, surtout si tu ne fais pas d’imprudence. À ce propos, je trouve que Mme Lockroy ferait bien de ne pas aller avec ses enfants déjeuner à Charenton aujourd’hui, car la route est longue et le temps bien dur pour des petits frileux comme eux et comme elle. Malheureusement je n’ai pas voix au chapitre et je ne peux que souhaiter bonne chance à leur témérité.
Tu sais que c’est aujourd’hui que tu dois signer tes portraits : souvenirs du 27 février 1881 [1]. Le bon Lesclide ne te laisseraa que la signature à donner, c’est à dire plus de trente fois ton nom et cela sans préjudice d’un tas de lettres importantes qui attendent une réponse depuis déjà longtemps.
Cher adoré bien-aimé, je te recommande de veiller sur ta chère santé qui est mon bien, ma joie, mon bonheur et ma vie.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16402, f. 69
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette
a) « revenisi ».
b) « laisseras ».