Paris, 9 août 1881, mardi matin, 8 h.
Cher bien-aimé, je t’ai laissé ce matin profondément endormi mais il m’est impossible de me rendre compte de ce qu’a été ta nuit parce que j’ai dormi très dur et parce que, chaque fois que je m’éveillais, tu dormais ou paraissais dormir, ce qui n’est pas la même chose. Enfin, mon grand adoré, je veux croire pour ma satisfaction momentanée, et jusqu’à preuve du contraire, que tu as passé une bonne nuit.
Je ne sais pas encore de nouvelles de Mme Lockroy, mais je désire et j’espère qu’elles seront bonnes. En attendant, je viens d’envoyer chez Lesclide pour lui dire de venir dîner ce soir avec sa belle-sœur et son gendre et d’inviter Mendès et Frémine aussi pour ce soir. Je pense que M. Lockroy dînera comme d’habitude auprès de sa femme malade et que Jeanne ira rejoindre son frère chez Mme Ménard. C’est pourquoi j’ai profité de tous ces vides possibles, hélas ! pour faire toutes ces invitations d’occasiona.
Le ministre des Postes et Télégraphes [1] t’envoie deux billets, d’une personne chaque, pour assister demain aux expériences, je me trompe, à l’Exposition Internationale d’Électricité [2]. Les portes seront ouvertes à midi aux Champs-Elysées. Je te porterai tantôt ces deux billets pour que tu avises, sans retard, à l’emploi que tu veux en faire. Du reste, rien de nouveau jusqu’à présent, ni dans les affaires publiques ou privées.
Il n’y a que mon vieil amour toujours jeune et persistant que je mets à tes pieds que je baise et sur ton front que j’adore.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16402, f. 182
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette
a) « occasions ».