Paris, 7 octobre [18]79, mardi matin, 7 h. ½
Bonjour, mon doux bien-aimé, puisse ta nuit avoir été aussi bonne que la mienne a été mauvaise et j’en remercierai Dieu. Le temps continue d’être merveilleusement beau et la fugue vers Naples [1] plus tentante que jamais. C’est grand dommage que tu ne puissesa pas te payer cette fantaisie de cœur et d’yeux. Tout soleil dehors, tout bonheur dans l’âme, quel rêve ! On reviendrait tous ensemble pour la rentrée des chambres, ce serait charmant. Mais puisque ça n’est pas possible, n’en parlons plus. Mon sort est assez heureux comme cela. Il n’y a que toi, mon pauvre génie de somme, à qui manque l’essentiel de la vie : la vue et les baisers de tes chers petits-enfants tous les jours. Espérons qu’ils te reviendrontb bientôt en dépit de la séduction et de l’acoquinement du beau climat et du far niente. En attendant je t’adore à brûle cœur, je te souris et je te bénis pour tes chers absents et pour moi nuit et jour.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16400, f. 239
Transcription d’Apolline Ponthieux assistée de Florence Naugrette
a) « puisse ».
b) « reviendrons ».