Paris, 12 août [18]79, mardi matin, 8 h.
Cher bien-aimé, Mariette me dit que tu as bien passé la nuit, ce qui me met le cœur tout en joie. Tout à l’heure j’irai te porter mon gribouillis et t’embrasser si tu ne dors pas. Autrement je me contenterai de te baiser des yeux et de l’âme pour ne pas te réveiller. Je me suis appliquée ce matin dès l’aube à tâcher de déchiffrer le grimoire timbré qu’on t’a envoyé hier. Voici ce qui m’est apparu de plus clair dans ce long et inextricable fouillis de mots moisis et suspects, c’est que tu es solidairement, avec le sieur Huguesa [1] libraire, cité à comparaître devant le tribunal de commerce pour répondre à une demande de mille francs de dommages et intérêts envers le sieur [Devillairé ?] et compagnie éditeurs rue du Four St Germain Paris pour avoir publié, sans droit, une édition nouvelle de Notre-Dame illustrée. Attendu que le requérantb a été autorisé par M. Paul Meurice à publier dans son journal littéraire le 15 juillet 1871, ou 1878, le chiffre est douteux, la Notre-Dame illustréec.
Voilà, mon grand petit homme, ce que j’ai pu comprendre de ce fatrasd chicanier que tu déchiffreras probablement mieux que moi qui ne sais que t’aimer de tout mon cœur.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16400, f. 198
Transcription d’Apolline Ponthieux assistée de Florence Naugrette
a) « Hughes ».
b) « requerrant ».
c) « illustré ».
d) « fratras ».