Bruxelles, 11 août [18]67, dimanche, 8 h. ½ du m[atin]
Ne t’inquiète pas de moi, mon cher bien-aimé, car j’ai passé une bonne nuit et je ne souffre plus du tout. De ton côté, il faut que tu aies bien dormi, que tu te portes bien et que tu m’aimes pour que rien ne manque à mon bonheur et à ma santé. N’est-ce pas demain que nous devons aller à Anvers ? Le temps est beau. Reste à savoir si les yeux de ta femme peuvent braver le grand jour. Tu me diras cela tantôt.
Je n’ai pas pu te dire hier que j’avais reçu à l’hôtel une lettre de Mme Ledon pour ta fête, laquelle lettre m’a été renvoyée de Guernesey ici par Mme Chenay, probablement croyant bien faire assurément en me faisant débourser trente-huit sous pour le compliment de cette pauvre femme. Heureusement que cela ne peut plus se renouveler au moins avant un an. Et puis pour contrepoids à cet hommage onéreux, tu as aujourd’hui la visite du jeune Paul Verlaine [1], lequel a fait ce voyage de Paris ici uniquement pour te voir. Tout cela est bien touchant et me remue le cœur profondément et me donne le besoin de baiser tes chers petits pieds adorés. Tu es mon grand et vénéré bien-aimé.
BnF, Mss, NAF 16388, f. 214
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette