17 juin 1855

18 juin 1855

Jersey, 17 juin 1855, dimanche après-midi, 2 h. ¼

Bonjour, mon cher petit ENTREMETTEUR, je viens de voir M^me Florence avec laquelle j’ai eu cinq minutes de conversation mi-partie anglaise car cette dame n’est rien moins que française au moins par le langage. Il est convenu que dès que j’aurai fait mes achats je le lui ferai savoir. Du reste, elle convient elle-même que Ramier est fort cher et qu’elle n’y achèterait rien à son usage si elle en avait le choix. Elle m’a confirmé ce que m’avait dit M^lle Allix du bon marché d’Aubin, le voisin de Ramier. Voilà, mon cher petit homme les choses intéressantes qui se sont passées à l’occasion de cette première entrevue (pas sur le NIEMEN [1], mais au Hâvre-des-Pas). Maintenant il faut que je songe à RÉDIGER une épître pour la petite Préveraute [2], ce qui m’ennuie un peu beaucoup, mais son mari doit venir ce soir chercher ce poulet épistolaire tant de fois ajourné. Quel dommage que vous ne soyez pas là, je vous aurais proposé de collaborer avec moi et au besoin j’aurais corrompu votre plume vénale par des sommes folles mais vous n’y êtes pas, hélas ! A ce propos, je vous demande où vous êtes dans ce moment-ci ? Je n’aurais pourtant pas mieux demandé que de faire prendre l’air à mon mal de tête. Mais puisque vous ne vous y prêtez pas je le garde à domicile. Je suis honteuse d’être plus bête encore aujourd’hui qu’hier et de vous aimer encore plus fort que ma stupidité ne le comporte. Tant pire pour vous.