Encore une journée d’essoufflement et de fatigue, mon grand bien-aimé, mais qu’importe si en fin de compte, il me reste ce soir encore assez de temps et de force, avant que tu viennes tout à l’heure, pour te dire le mot sacramentel de ma vie : je t’aime ! Mariette m’a dit ce matin que tu avais bien dormi et que tu te portais bien, ce qui m’a comblée de joie et de bonheur. Je regrette seulement que nous ne soyons plus nombreux ce soir pour porter la santé de la pauvre République qui me parait bien malade à en juger par les horribles drogues qu’elle s’administre depuis dix huit mois qu’elle est au monde.
Enfin, au petit bonheur ! Pourvu que petit Georges et que petite Jeanne continuent de croître en bonté, en beauté, en intelligence, je me déclare satisfaite et je remercie Dieu. J’espère que tu auras trouvé le moyen de contenter Mme P. Meurice, c’est-à-dire son excellent mari dont le dévouement admirable et infatigablea pour ta personne et pour ta gloire mérite que tu lui concèdes tout de même le talent de Mélingue dans don César de Bazan [1]. Mais je connais ta tendresse pour ton disciple et je suis sûre qu’en ce moment il est le plus heureux des hommes. Moi je t’adore, c’est mon lot.
MVHP - ms - a9162
Transcription de Michèle Bertaux
a) « infatiguable ».