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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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8 mai 1863

Guernesey, 8 mai [18]63, vendredi matin, 8 h.

Bonjour, mon amour, bonjour, mon bonheur, bonjour, ma vie, bonjour, mon tout adoré, comment vas-tu de la tête aux pieds, au dedans et au dehors de toi, ce matin ? Si c’est affirmativement bien alors montrez-moi vos jambes jusqu’au menton et soyons heureux depuis pater jusqu’à amen. Quant à moi, mon cher petit homme, tu as pu juger de la longueur et de la bonté de ma nuit par l’heure avancée à laquelle je me suis levée. De plus je me porte comme un turc et je t’aime comme un diable. Telle est ma situation physiquea et morale ce matin ; je désire qu’elle vous satisfasse car je ne pourrais faire pire ni mieux pour aujourd’hui. Le temps reste toujours beau quoiqu’il ait le cœur gros de pluie qui ne demande qu’à s’épancher. Je viens de parler à ta Marie qui venait rapporter l’assiette de mon gâteau. Je lui ai fait honte de ses soles d’hier et je lui ai recommandé de ne plus acheter de soles anglaises qui, même fraîches, sont très inférieures à celles de Guernesey. Elle m’a promis de ne plus recommencer et voilà. Je voudrais bien que mon chat aussi ne recommençâtb plus à tuer les petits oiseaux de mon voisinage car je ne connais rien de plus pitoyable que les pauvres petits cadavres de ces doux êtres ailés déchirés et à moitié dévorés sur mon gazon par ce féroce et cruel Fouyou. En ce moment même je vois le reste d’un pauvre petit oiseau laissé sous un de mes pommiers par mon monstre de chat et j’en suis toute contristée. Encore si je connaissais un moyen d’empêcher ces massacres d’innocents ? Mais il n’y en a pas et voilà l’agaçant et le triste. Je me tourne vers toi, mon bien-aimé, pour y trouver toutes les émotions douces, généreuses et clémentes et je t’adore de toute mon âme.

BnF, Mss, NAF, 16384, f. 120
Transcription de Chantal Brière

a) « phisique ».
b) « recommença ».

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