Paris, 9 juin [18]79, lundi, 1 h. après midi
C’est après m’être assurée de visu et d’auditu, mon grand petit homme, que tu dormais à poings fermés que j’ai commencé ma journée avec entrain et joie en espérant qu’elle s’achèvera avec le même contentementa de toi et de moi.
Schœlcher m’écrit pour me remercier de la double lettre que je lui ai écriteb pour l’empêcher de venir se casser le nez samedi dernier sur notre marmitec renversée [1]. Mais, en même temps, il m’exprime le regret d’être toujours oublié dans les fêtes littéraires dont tu es le principal attrait. Il dit à ce sujet qu’il n’a pourtant jamais refusé ni sa bourse ni son cœur. Il viendra dîner avec toi samedi prochain. Une nouvelle lettre du général Cremer au nom du comité dont il est le secrétaire général pour t’informer que les ouvriers anglais d’accord avec les ouvriers français d’Italie et de plusieurs autres pays ont jugé digne de perpétuer le souvenir du congrès littéraire [2] dont tu étais le président d’honneur l’année dernière par une adresse gravée et enluminée.
Le tableau est prêt à t’être envoyé. Une députation de l’association se rendra à Paris pour te [le] présenter et à cette occasion les ouvriers de Paris ont résolu d’offrir un banquet aux délégués anglais. À cette occasion on te demande si tu consentirais à assister à cette fête de famille, témoignage de profonde gratitude et de dévouement respectueux. Puisque te voilà je me hâte de laisser là mon gribouillis pour aller t’embrasser en chair et en os.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16400, f. 147
Transcription de Chantal Brière
a) « contement ».
b) « écrites ».
c) « marmitte ».