Paris, 30 mai [18]79, vendredi matin, 7 h. ½
Bonjour, mon grand bien-aimé, mon trop aimé bien-aimé, bonjour, je te souris et je te bénis. Si mon désir et ma prière ont été exaucés tu dois avoir passé une très bonne nuit et m’aimer comme je t’aime de tout ton cher, grand et loyal cœur. Je viens de lire à L’Officiel [1] le compte-rendu in extenso de la séance du Sénat d’hier qui se termine par un ordre du jour qui fixe à jeudi prochain la séance publique à deux heures. Cela va te donner un peu de loisir pour répondre à plusieurs lettres en retard. Quant à nos promenades, je crains qu’elles ne soient tombées dans l’eau indéfiniment à en juger par le temps qu’il fait ce matin. Nous pourrions cependant, si tu le veux, aller en voiture fermée tantôt faire un petit tour au Salon où tu as plusieurs choses à voir, d’abord, avant tout, pour consoler ce brave Voillemot de l’injustice du public, voir les portraits de tes chers petits et lui en faire compliments de visu et du cœur ; ensuite le portrait de Gérômea [2] par le brave et charmant Léon Glaize. Puis, enfin, revoir ton portrait par maître Bonnat [3] qui attend de toi son satisfecit mérité pour son chef-d’œuvre. Puis en finb des fins m’aimer, moi qui t’adore.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF, 16400, f. 136
Transcription de Chantal Brière
a) « Jérome ».
b) « enfin ».