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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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8 février [1846], dimanche matin, 9 h. ¾

Bonjour mon Toto bien aimé, bonjour mon petit homme chéri, bonjour mon cher amour, bonjour de toute mon âme, comment vas-tu ? J’ai rêvé de toi toute la nuit, je pense à toi tout le jour. De cette façon, ma pensée ne te quitte jamais. Que n’en est-il de même de mon corps ? Mon pied va un tantinet mieux, c’est-à-dire que l’excessive sensibilité diminue un peu depuis hier [1]. Dès que je pourrai me chausser je profiterai de l’admirable temps qu’il fait. Il est vrai que probablement il sera passé et qu’il pleuvra à torrents tous les jours. Eh ! bien ça m’est égal. Je sortirai tout de même, je sens que j’ai un besoin extrême de marcher. [illis.] mes lettres. Voime, voime mais je n’ai pas assez de mémoire pour narrer fidèlement la suite de cette terrible et sublime histoire. C’est triste mais qu’y faire ? Baisez-moi, vous, et aimez-moi philippin philippine [2] ou je vous tirerai le nez tout bonnement. Vous ne voulez pas me donner à copier bien décidément ? Une fois, deux fois, trois fois ? Eh ! bien j’en prendrai à moi-même voilà tout. Je suis fatiguée de vous solliciter en vain maintenant je me servirai moi-même, ATTRAPÉ ! Je vous baiserai moi-même ATTRAPÉ ! Je vous aimerai toute seule. Attrapé.

Juliette

Bnf, Mss, NAF 16362, f. 135-136
Transcription d’Audrey Vala assistée de Florence Naugrette


8 février [1846], dimanche soir, 5 h. ¼

Hein ! Quel guignon ! Il n’y a que moi pour avoir cette chance perpétuelle de guignon. Tu viens un moment, Mlle Féau est là ! Tu peux rester quelques minutes par hasard et cette ennuyeuse vieille fille ne s’en va pas. Si j’avais osé je crois que je l’aurais mise à la porte et maintenant elle est partie, la belle avance. Il est vrai que Joséphine vient de lui succéder agréablement. Enfin cela vaut encore mieux que d’être tout à fait seule comme une pauvre prisonnière. Seulement je suis furieuse quand cela me prive du bonheur de te voir une minute. Je crains que tu ne reviennes plus d’ici à ce soir très tard et j’enrage dans ma peau. Ma vie toute entière se passe à te regretter et à te désirer. C’est une occupation qui n’a son charme que lorsque tu l’interromps souvent, cher petit homme chéri. Je te dis toujours la même chose et cependant il me semble que c’est la première fois que je te dis toutes ces choses tant mon amour est resté vif dans sa première impression. Je crois que je mets la charrue devant les bœufs dans cette phrase-là ! Et peut-être même par-dessus les bœufs, mais tu devineras ce que j’ai voulu dire : tu es assez fort sur les à peu près pour ne pas être embarrassé devant mes rébus involontaires. Je t’adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16362, f. 137-138
Transcription d’Audrey Vala assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Juliette souffre de la goutte.

[2À élucider.

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