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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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6 février [1848], dimanche matin, 10 h.

Bonjour, mon Toto bien aimé, bonjour. Il paraît que tu as pu ouvrir la porte sans l’aide de Suzanne qui du reste prétend ne l’avoir fermée qu’au pène. Quant à moi le sommeil me tournait tellement sur le cœur dans ce moment-là, qu’il m’aurait été impossible de venir à ton secours. Une fois que je suis vaincue par le sommeil je ne suis plus bonne à rien car il me semble que je vais mourir tant mon cœur est noyé. J’espère que tu n’auras pas eu trop de peine pour fermer la porte cette nuit. Tu penses qu’à travers mon sommeil douloureux j’étais préoccupéea de cette pensée, ce qui fait qu’en somme j’ai horriblement mal dormi. Pour comble d’infortune le bois qui n’était pas éteint a roulé sur le devant du foyer et quand je m’en suis aperçue j’étais suffoquée par la fumée. Je me suis relevée croyant le feu à la maison. Enfin j’ai passé une nuit atroce et dont je me ressens ce matin. Pour en finir avec mes tribulations je te dirai que ma pendule s’est cassée d’elle-même cette nuit et qu’elle ne va plus. C’est la chaîne probablement qui s’est rompue car on la monte sans fin et le balancier ne fait plus mouvoir les aiguilles. J’espère qu’en voilà des ennuis. Il faudra joliment m’aimer pour me rabibocher.

Juliette

MVH, 8044
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Michèle Bertaux

a) « préocupée ».


6 février [1848], dimanche après-midi, 3 h. ½

Je ne suis pas encore prête, mon amour, et le médecin doit venir de quatre à cinq heures. Tu vois que je suis en retard. Cependant je ne veux pas manquer à ma douce habitude et je te gribouille en toute hâte ces quelques lignes tendres mais bêtes. Quand tu sauras tout ce qui m’est arrivé cette nuit tu me plaindras car vraiment j’en ai besoin pour oublier toutes mes mésaventures nocturnes. On n’a pas plus de guignon que moi en toute chose. D’aborda ce stupide sommeil qui me prend et dont je ne suis pas maîtresse, tout cela m’agace au dernier point et je suis plus rageuse qu’un chien encore à présent. Pourtant il faut que je me calme car je veux que le médecin puisse faire ses observations dans les meilleures conditions. Aussi je fais ce que je peux pour me faire accroire que je suis la plus aimable des Juju. Voime, voime avec cela que c’est facile. Je croirais plutôt au beau soleil d’aujourd’hui et à la fidélité de Toto. D’abord ça serait à la rigueur plus croyable. Taisez-vous, baisez-moi et venez bien vite.

Juliette

MVH, 8045
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Michèle Bertaux

a) « Dabord ».

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