Guernesey, 30 juin [18]73, lundi, 9 h. ½ du m.
J’entends en ce moment le sifflet de la vapeur et le bruit du dérapement du bateau qui emmène ton ami P. Meurice vers la France où il arrivera demain matin, sans encombre cette fois, je l’espère, mais non sans émotion de l’accueil plus que fraternel qu’il a reçu de toi, le plus grand et le plus merveilleux des hommes. De mon côté, je lui ai fait, grâce à toi, mon généreux homme, le plus beau cadeau qu’il pût souhaiter en lui donnant ton magnifique dessin oriental sur La Légende des siècles auquel je tenais comme à mes yeux. Pourtant je ne regrette pas ce sacrifice en pensant à ce qu’il est pour toi, c’est-à-dire l’ami le plus tendre, le plus sage, le plus sûr et le plus dévoué. Si la reconnaissance peut être une bénédiction, je lui donne la mienne à travers l’amour que j’ai pour toi. En même temps je demande à Dieu de t’envoyer tes enfants tout de suite et de ne plus t’en séparer. Je te souris, je t’aime, je te vénère, je t’admire, je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16394, f. 195
Transcription de Maggy Lecomte et Manon Da Costa assistées de Florence Naugrette