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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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4 août 1846

4 août [1846], mardi matin, 8 h.

Bonjour mon Toto bien-aimé, bonjour mon cher amour adoré, bonjour toi, je t’aime. Pauvre aimé, comment vas-tu ce matin ? As-tu un peu dormi cette nuit ? Ton vilain travail t’a-t-il laissé un peu de répit au moins ? Quel malheur que je ne puisse pas t’aider après cela. Je n’y ai jamais essayé. Peut-être que si je commençais, vous ne voudriez plus rien faire et vous me laisseriez tout l’ouvrage. J’aime mieux ne pas commencer et vous laisser croire que je suis incapable. Jour Toto, jour mon cher petit o. Je vous aime, vous saurez ça. Baisez-moi pour la peine et venez bien vite. La journée sera encore bien chaude aujourd’hui. Cependant si vous voulez me permettre de vous accompagner jusqu’à l’Académie ou de vous y aller chercher, je ne reculerai pas devant les trente-cinq mille degrés de rôtissure qui m’attendent sur le quai. Autrefois vous n’y auriez pas manqué. Maintenant vous ne voulez plus que je vous accompagne nullea part, pas plus l’été que l’hiver, par le beau temps que par la pluie. Ce serait pourtant bien gentil et je serais toujours prête si je pouvais espérer tous les jours que tu viendras me chercher pour marcher avec toi. Mais je me prépare pas à tout hasard parce que jamais jusqu’à présent cela ne m’a réussi et j’en suis pour mes déceptions et mes frais de toilette matinale. Je serais pourtant bien heureuse si tu te prêtais à des sorties quotidiennes, ou du moins très fréquentes. En attendant que ce désir se réalise, je te baise et je t’aime de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16364, f. 7-8
Transcription de Marion Andrieux assistée de Florence Naugrette

a) « nul ».


4 août [1846], mardi après-midi, 2 h. ½

Eh ! bien, vous ne saurez pas par quel chemin j’irai : attrapéa ! C’est un double bonheur pour moi que celui d’aller vous rejoindre et de vous faire enrager. Ces deux exquises choses ne me sont pas données assez souvent pour que je sois blasée dessus. Je suis bien contente, mon cher amour, que tu m’aies permis de t’aller attendre chez cette bonne Mme Rivière que je n’avais pas revue depuis cette triste époque [1]. Je sais qu’elle est elle-même très souffrante et je suis sûre que je lui ferai plaisir en y allant. J’aurai le bonheur de revenir avec toi, ce qui me sera on ne peut pas plus doux. À propos de doux, vous ne l’avez guère été tout à l’heure avec moi, car vous m’avez drôlement secouée au sujet de votre maire, de votre mairie et de votre carte dont je crois entrevoir le dessous. Une autre fois je vous prierais de ne pas me bousculer aussi rudement, à moins que vous ne vouliez vous faire arracher les yeux par représailles. Tiens, tiens je n’ai pas besoin moi d’être menée comme un pauvre chien galeux. C’est déjà bien assez que je vous aime comme une bête sans encore que vous me battiez comme plâtre. Taisez-vous et baisez-moi. Je vous pardonne pour cette fois mais n’y revenez plus.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16364, f. 9-10
Transcription de Marion Andrieux assistée de Florence Naugrette

a) « attrappé ».

Notes

[1Époque de la mort de sa fille.

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