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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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13 mai 1854

Jersey, 13 mai 1854, samedi soir 6 h. ¼

C’est presque un bonsoir que je te dis, mon cher petit bien-aimé, bien que j’aie à peine eu le bonheur de te dire bonjour. Mais ce que ma bouche n’a pas le temps de dire, mon cœur le répète depuis un bout de ma vie jusqu’à l’autre, le sommeil y compris, car je rêve toujours de toi. J’ai bien regretté hier au soir de ne pas mieux profiter de ton passus mille mais cela m’était tout à fait impossible. Tout ce que j’ai pu faire, ça été de m’empêcher de pousser d’affreux cris, je ne crois pas qu’on souffrirait davantage si on vous sciait le crâne ou si on vous le broyait sous des talons ferrés. Il n’y a guère qu’une heure ou deux que je suis un peu calmée et que je commence à reprendre un peu mes esprits, tant pis pour toi si tu ne t’en aperçois pas. Du reste, mon pauvre adoré, si tu voyais le fond de ma pauvre âme tu me saurais gré de te sourire et de folâtrer, même avec si mauvaise grâce. Si l’amour a une forme visible dans l’autre monde, tu verras tout ce que le mien a souffert pendant cette vie d’être si mal et si piteusement représenté par ma pauvre personne. En attendant, je te souris et même je ris afin de te faire un peu de joie, et puis je t’attends. Tâche que ce ne soit pas en vain. Quels que soienta mon courage, ma patience et ma résignation, j’ai besoin de reprendre mon cœur et mes forces à un peu de bonheur. À bientôt, mon trop bien-aimé.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16375, f. 184-185
Transcription de Chantal Brière

a) « quelque soit ».

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