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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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6 juillet [1844], samedi, midi ½

Bonjour, mon Toto adoré, bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour, ma vie, bonjour, ma joie, bonjour, mon âme, comment vas-tu et comment m’aimes-tu ? Moi je vais bien car je t’aime de tout mon cœur et plus encore. Tu penses que je suis levée depuis huit heures du matin. Mais une chose en entraîne une autre ; et pour ne pas faire perdre de temps à mes deux péronnelles [1], je suis quelquefois obligée de reculer le moment de t’écrire. Mais je pense à toi, mon bien-aimé, mais je t’adore, mon beau petit Toto.
C’est Eulalie qui va chercher Claire et qui la mènera chez son père. J’aime autant cela parce que cela fait marcher ma pauvre grande fillette qui a besoin d’exercice, et, en somme, cela ne me fait pas plus de frais, au contraire, car j’ai de moins tous les omnibus à payer et une demi-journée de temps perdu à Eulalie. Cela se compense à un sou près.
En vérité, c’est bien intéressant ce que je te dis-là : ce que c’est que d’être bête comme une oie, cependant. Je t’en demande bien pardon, mon cher adoré. Je t’aime, voilà tout ce que j’ai à te dire, tu es mon Victor toujours plus aimé.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 233-234
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette


6 juillet [1844], samedi soir, 9 h. ¼

Mon petit Toto chéri ! Vous serez bien aimable, bien gentil, presque autant que vous êtes désiré et aimé, si vous venez ce soir de bonne heure. Vous vous devez bien un peu à cette pauvre Claire qui vous fait toutes sortes de petites galanteries charmantes. Je ne parle pas de moi parce qu’il m’est trop prouvé que je ne vous attire pas, au contraire. Je ne dis pas cela pour rire, entendez-vous, scélérat, je le dis pour vous faire honte et pour vous donner des remords, si toutefois vous êtes capable d’en éprouver.
Je continue d’avoir très mal à la tête, c’est à peine si j’y vois assez pour t’écrire les jolies choses spirituelles que je viens de te gribouiller. Je remettrais bien la suite à demain mais je serai probablement la même chose demain et après-demain et les jours suivantsa. C’est vraiment décourageant ; il y a des moments où le découragement et le dégoût de la vie me poursuivent à ne savoir que devenir. Je suis dans un de ces moments ce soir. J’attribue cela à une certaine époque qui me fait toujours beaucoup souffrir [2]. Aussi, je te prie de n’y pas faire attention ; si tu venais, je serais la plus heureuse des femmes et il n’y paraîtrait plus du tout.
Je t’aime mon Victor adoré, je t’aime mon Toto chéri, je souffre, je suis bête mais je t’aime de tout mon cœur. Je vais t’apprêter des gants, tu les emporteras ce soir avec le bouquet. À propos du bouquet, si tu veux, Lambin te le parfumera demain matin ? Tu n’auras qu’à me dire cela ce soir. Et puis je baise tes quatre petites pattes blanches.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 235-236
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette

a) « suivant ».

Notes

[2Périphrase pour désigner les règles.

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