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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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18 juin 1842

18 juin [1842], samedi matin, 9 h. ¾

Bonjour mon cher petit adoré, bonjour mon charmant petit homme, bonjour mes chers petits amis, comment avez-vous passé la nuit tous les deux ? Si vous me dites bien, je suis heureuse, car votre santé, mes chers petits hommes, c’est ma vie et ma joie.
Est-ce que je ne vous verrai jamais dans le beau caleçon rouge ? Vous devez être bien gentil dans ce magnifique costume et je voudrais bien jouir du coup d’œil pendant une petite minute. Si nous pouvions faire un petit voyage cette année [1], rien ne pourrait empêcher d’emporter le susdit et de vous livrer à des planches immodérées sur tous les fleuves et sur tous les océans que nous rencontrerions sur notre passage. Mais pour cela il faut que notre cher petit malade guérisse bien vite [2]. Dieu sait, indépendamment de cette raison si importante pour moi, si je désire le rétablissement de ce pauvre petit ange. Je donnerais tout ce qu’on voudrait et autant de ma vie pour qu’il fût hors de tout danger tout de suite. Bonjour mon cher petit bien-aimé ravissant, bonjour, je t’aime. Il fait bien beau, tâche de venir me chercher pour me promener un peu sur la montagne. Je suis si heureuse quand je suis avec toi, mon adoré, que je voudrais que ce fût tous les jours et toujours. Je baise tes chers petits pieds.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16349, f. 151-152
Transcription d’Ophélie Marien assistée de Florence Naugrette


18 juin [1842], samedi après-midi, 1 h.

Je continue d’être vexée, mon Toto chéri, je viens de recevoir la lettre de la mère Ledon qui m’annonce que son mari ne pourra pas venir avant lundi. Mais j’ai des maux de tête si grands que ces deux jours de supplice vont me paraître très longs. Enfin il faut bien se résigner, trop heureuse encore qu’il n’arrive pas d’anicroche lundi. Voilà où j’en suis réduite avec mon hideuse perruque [3]. Nous verrons si la faiseuse de corset sera plus exacte et si elle réussira mieux. Car vraiment je n’ai de chance pour rien. Les grandes comme les petites choses ne me réussissent pas du tout. C’est à en donner sa démission au diable. Mais je suis toute prête à me raccommodera avec lui si tu viens tout à l’heure me chercher pour sortir. Hélas ! ça n’est pas probable ni possible ; tu travailles et en outre l’école de natation me prend la pauvre petite chance que j’aurais que tu me fasses sortir dans la journée. Cependant je veux que tu le fasses car cela te rafraîchit et te fait plaisir, deux choses pour lesquelles je donnerais ma santé et mon bonheur.
Lanvin vient de venir avec toutes les reconnaissances timbrées et datées. Il paraît que le pauvre homme a été presque aussi inquiet que moi en s’apercevant de l’omission. Enfin tout est réparé. Quant à lui, le pauvre diable, il est grillé de soleil et paraît exténué de fatigue. Je lui ai redonné du courage en lui faisant espérer une place meilleure et fixe. Je compte sur toi pour justifier mes promesses. En attendant, je t’aime de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16349, f. 153-154
Transcription d’Ophélie Marien assistée de Florence Naugrette

a) « racommoder »
b) « appercevant »

Notes

[1Leur voyage annuel n’avait pu avoir lieu en 1840.

[2François-Victor, fils de Victor Hugo, se remet d’une maladie.

[3Juliette se désole de voir apparaître des cheveux blancs et cherche à y remédier.

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