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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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13 novembre [1835], vendredi matin, 9 h. ¾

Bonjour, mon Toto bien aimé, bonjour. Tu as bien fait de venir hier au soir. Tu m’as combléea de joie et j’en avais besoin car je m’étais couchée bien triste. Tu as eu de bonnes paroles qui me résonnent encore dans le cœur et qui m’ont fait rêver la nuit.
J’espère que ton cher petit ange, ton pauvre petit Toto, n’aura pas souffert cette nuit et que la tranquillité de son sommeilb t’aura permis de prendre quelque repos. Mes deux pauvres petits Toto chérisc, j’ai bien pensé à vous deux cette nuit [1]. Je vous ai bien plaintsd et bien aimése, mes deux pauvres petits anges.
Je ne sais pas quand je te verrai, mais dans tous les cas, tu peux être sûr que quelle que soit l’heuref à laquelle tu viendras, tu me trouveras occupée de toi et t’aimant de toute mon âme. Tu me pardonneras un peu de tristesse parce que je ne peux pas être sans toi une minute sans en éprouver. Ainsi juge ce que cela doit être quand cela se prolonge des journées presque entièresg comme celle qui viennent de s’écouler.
J’ai passé une assez mauvaise nuit, c’est-à-dire que j’ai eu et que j’ai encore très mal à la tête et aux entrailles. Décidément, je suis une vieille patraque et bonne tout au plus à jouer la grand-mère.
Je voudrais bien te voir pour déraisonner un peu avec toi. Il y a si longtemps que cela ne m’est arrivé, qu’en vérité je ne sais pas si je me le rappelleraih. Il y a longtemps que les puérilitési voyageuses m’ont quittéej. Je commence à croire qu’elles ne reviendront plus jamais. Qu’en dis-tu, toi, mon adoré ?

J.

BnF, Mss, NAF 16325, f. 114-115
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « tu m’as comblé ».
b) « someil ».
c) « chéri ».
d) « plaint ».
e) « aimé ».
f) « quelque soit l’heure ».
g) « presqu’entière ».
h) « rappelerai ».
i) « puérilitées ».
j) « m’ont quittées ».


13 novembre [1835], vendredi soir, 9 h. ¼

Mon cher petit bonhomme, vous avez l’air fort mouzon ce soir malgré toutes les agaceries de votre pauvre Juju, ce qui était d’autant plus injuste et plus triste qu’il n’y avait rien de ma faute et que venant à l’heure où vous êtes venu, mon cher petit homme, il était plus que probable que quelque contretemps arriverait : ce qui n’a pas manqué. Mais, mon cher petit homme chéri, tu dois reconnaître que je ne t’ai jamais plus ni mieux aimé qu’à présent et que si tu revenais sur le passé, tu verrais que jamais je n’ai été plus amante dévouée qu’aujourd’hui. J’ai donc été affligéea de la petite mine boudeuse que tu avais tantôt, ce qui a donné à penser à Mme Pierceau qu’elle avait été indiscrète en restant. Tout cela, je l’espère, sera passé quand je te verrai et nous n’aurons plus qu’à nous aimer comme deux bonnes petites gens qui n’ont rien à se reprocher l’un l’autre.
Je t’attends, mon cher petit homme, avec la crainte que tu ne viennes pas aussi tôtb que je le désire. Je t’attends avec beaucoup d’amour et tout plein de baisers.

J.

BnF, Mss, NAF 16325, f. 116-117
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « affligé ».
b) « aussitôt ».

Notes

[1François-Victor Hugo est convalescent.

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