Guernesey, 21 juin 1868, dimanche, 6 ? h. ½ du illis.
Cher adoré, je m’efforce de n’être pas triste malgré le douloureux anniversaire d’aujourd’hui [1]. J’espère que j’y parviendrai à force de t’aimer. Déjà, je t’ai vu, ce qui est un réconfortant pour mon cœur. Je craignais que tu n’aies mal dormi mais j’espère, maintenant que je t’ai vu, que ce n’est qu’un léger retard dans tes habitudes matinales. Quant à moi, j’ai peu dormi, sans souffrance cependant. Depuis 3 h. du matin, j’ai mes fenêtres ouvertes et je me serais levée dès cette heure-là si je n’avais pas craint de réveiller Suzanne. J’ai attendu que 6 h. soient sonnées pour ouvrir ma porte. Maintenant je peux me mouvoir à mon aise dans ma maison et j’en use pour me distraire des poignants souvenirs que cette funèbre date réveille en moi. Et puis je t’adore, ce qui est mon seul point d’appui en ce monde.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 172
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette