3 septembre [1836], samedi matin, 7 h. ¾
Si vous n’êtes pas à Paris mon cher bien-aimé vous êtes un bien grand fourbe et un bien affreux traître. Mais si vous y étiez par hasarda vous êtes un pauvre petit homme bien à plaindre et qu’on ne saurait trop aimer. Mais à vous parler franchement je ne crois pas en être à cette supposition et que la première estb la plus sûre et la plus vraie. Aussi vais-jec vous haïr de tout mon cœur, de toute mon âme et de toutes mes forces.
Je suis dans les maçons jusqu’au cou de la cuisine. Ma bonne est chez Mlle Hureau, ma fille est couchée et moi je ne dors pas depuis plus de deux heures. Ceci vous apprendra à ne pas découcher.
Je suis dans un grand embarras, M. Vidal est absent depuis plusieurs jours à ce que m’a écrit son suppléantd. je ne sais pas si je dois me servir de cet homme ou attendre indéfiniment. L’état de la petite n’est pas alarmant, cependant j’aurais désiré consulter le médecin. Pour cela il me faudrait votre avis, mais où vous trouver à présent [1] ? Pour surcroît d’embarras mon père que j’attends à dîner aujourd’hui, il est probable qu’on ne pourra pas se servir de la cuisine de la journée. Ceci est le moins embarrassant cependant, mais le plus ennuyeuxe c’est que vous ne viendrez probablement pas de la journée et que je tremble pour celle de demain qui sera DIMANCHE. Si vous étiez capable d’une pareille atrocité je crois que je vous tuerais, parce que je vous aime trop [2].
BnF, Mss, NAF 16327, f. 290-291
Transcription de Nicole Savy
a) « hazard ».
b) « et ».
c) « vai-je ».
d) « supléant ».
e) « ennuieux ».