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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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12 juin 1863

Guernesey, 12 juin [18]63, vendredi matin, [illis.]

Tu m’as devancée ce matin, mon cher petit homme. J’espère que c’est le bon signe d’une bonne nuit et d’une bonne santé. Quant à moi, qui me suis levée plus tard, cela veut dire que j’ai dormi comme une marmotte et que je me porte un loup [1]. Si vous en doutez, malgré cette preuve zoologique, je jette ma plume au chien et ma langue au chat en attendant que nous puissions faire une good promenade tantôt pendant un entracte d’averse. Le pauvre Barnabé a eu un fier dessous, hier, il faut en convenir, et saint Médard lui a flanqué une tripotée dont nous avons reçu les éclaboussures. Il nous reste encore un dernier champion, le citoyen Gervais [2], qui doit dégainer sa bonne lame de Tolède le 19 de ce mois, mais j’ai peu de confiance dans ce patron des grisettes et des lilas [3]. Cela devrait être tout le contraire s’il faisait son devoir mais les saints du ciel sont comme les pécheurs de la terre sujets à de grandes distractions. Enfin, quoi qu’il arrive, nous n’avons rien à craindre pour notre petit voyage car toutes les sources du ciel seront taries au moment de nous mettre en marche, puisque le maximum de ce déluge annuel ne doit pas durer plus de quarante jours comme son aîné, le vieux, très vieux, bien plus vieux. Cela étant je me réjouis par anticipation et je vous adore IN HASTE comme [plusieurs mots illisibles].

BnF, Mss, NAF 16384, f. 154
Transcription de Gérard Pouchain

Notes

[1Masque de velours noir que portaient autrefois les femmes qui ne voulaient pas être reconnues.

[2Dicton : « S’il pleut le jour de la saint Gervais, il pleut quarante jours après. »

[3Allusion au drame-vaudeville en trois actes de Lagrange et Cormon, César Birotteau, dont la première représentation eut lieu au Théâtre du Panthéon le 4 avril 1838 : « C’est aux Prés Saint-Gervais, / Que la fillette / Et la grisette / Vont prom’ner leurs attraits, / Cueillir des lilas, prend’ le frais. » (couplet de Gaudissart, acte I, scène 11)

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