Jersey, 21 mars 1855, mercredi après-midi, 3 h.
Je ne demanderais pas mieux que d’être horriblement grognon et monstrueusementa méchante, mon trop ENFANT CHÉRI DES DAMES [1], mais comme cela ne diminuerait en rien le nombre de vos admiratrices et la quantité scandaleuse de vos bonnes fortunes, je renfrogne ma mauvaise humeur et mon amour et je tâche de m’effacer complètement. D’ailleurs vous avez perdu votre procès [2], je suis contente, bien aise de vous voir condamné AUX DÉPENS ! Et où se prennent VOS DÉPENS ? Si on ne peut pas PAYER un diable qui n’a pas de cheveux on peut encore moins PEIGNER un démagogue quand sa perruque est à Jersey et le peigne en France. Après cela il y a bien d’autres prodiges de la justice et de la chimie et je m’attends à tout de ce côté-là. Du reste il me semble, que ce PRÉCÉDENT, est d’un augure médiocre pour la publication en France de vos Contemplations, ceci soit dit sans rien préjuger d’offensant pour la vertueuse et immaculée délicatesse de MÔSIEUR BOUSTRAPA. Après cela vous me direz que vous vous retirerez sur la quantité des confiscations, spoliations, exactions, extorsions, AMENDES ET DÉPENS dont vous êtes comblé par le coup d’État et ses accessoires ou assesseurs. C’est bien fait. Vive la république universelle démocratique et Toto.
Juliette
BNF, Mss, NAF 16376, f. 123-124
Transcription de Magali Vaugier assistée de Guy Rosa
[Blewer]