Guernesey 9 janvier 1861, mercredi, 9 h. ½ du m[atin]
Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour et tout mon cœur par-dessus le marché. Comment vas-tu ce matin, mon doux petit homme ? As-tu bien dormi ? Es-tu content de ta gorge [1] ? Tu me diras tout cela tout à l’heure. En attendant, je te souris comme une Juju qui a très bien dormi et dont le pyrosis [2] (quel mot !) va beaucoup mieux. Je vous propose donc, à partir de ce moment, de jouter à qui sera le plus tôt guéri SANS MÉDECIN ET SANS DOULEUR ! La [prime ?] d’encouragement sera un immense bibelot à choisir parmi les vôtres ou dans les miens. Si cette proposition vous va, topez-là et ne perdez-pas une minute car je vous préviens que mon estomac ne s’amusera pas à la moutarde et qu’il aura bien vite rattrapé sa santé de très peu en arrière. Du reste il fait un temps charmant depuis 3 jours au froid près. Il est vrai que c’est justement ce froid qui nous est contraire. Mais, à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire [3], à ce que dit l’aphorisme, donc il faut triompher au nez et à la barbe du thermomètre et gagner notre bibelot à la force de notre santé et je m’y exerce séance tenante en vous aimant à bras tendus.
BnF, Mss, NAF 16382, f. 8
Transcription d’Amandine Chambard assistée de Florence Naugrette
a) « pyrhosis ».