Paris, 17 février 1882, vendredi matin, 8 h. ½
Cher bien-aimé, à partir de ce matin je reprends mon tendre papotage quotidien oùa je l’avais laissé, c’est-à-dire dans mon cœur, en te souhaitant le bonjour dans un baiser [1]. Je regrette que ce ne soit pas après une bonne nuit ; mais j’espère, Dieu aidant et le printemps aussi, que tu réussiras à remonter sur tes bonnes nuits d’autrefois. En attendant il faut faire de nécessité vertu et dormir à poings fermésb toutes les fois que tu auras eu de l’insomnie. Quant à moi, j’ai dormi comme une souche et je vais assez bien ce matin malgré la peur que tu m’as faite hier soir, sans le vouloir, pourtant. Aussi je te l’ai pardonnée, tout d’abord, trop heureuse d’en être quitte à si bon marché. Autre sujet de tranquillité, pas de Sénat aujourd’hui, demain seulement et à trois heures. Nous pourrons, si tu le veux, sortir tout de suite après ton déjeuner et reprendre notre projet d’aller à Saint-Mandé1. Ce que tu décideras, je l’accepte d’avance ; mon bonheur c’est d’être avec toi partout où il te plaît d’aller pourvu que je puisse t’y adorer !
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16403, f. 3
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette
a) « ou ».
b) « à poing fermé ».