Guernesey, 6 novembre [1864], dimanche, midi ½
Je serai prête, mon cher petit homme, mais auparavant de sortir et dans la crainte de n’avoir pas de temps tantôt, je veux te donner ma chère petite restitus d’amour. J’étais levée à 7 h. ce matin et j’ai dit en toute hâte un bon petit bonjour bien tendre à ton doux signal parce que c’est aujourd’hui dimanche, c’est-à-dire jour de messe et de sortie d’Elisabeth et qu’il fallait pour qu’elles fussent libres de bonne heure que je me dépêchasse de me débarbouiller, de déjeuner pendant qu’on faisait le ménage et le reste. Tout cela s’est exécuté aux dépensa de ma chère petite restitus que mes pattes de mouche s’efforcent de rattraperb dans ce moment-ci. J’espère que j’arriverai à temps pour ne pas te faire attendre. Du reste il fait assez frisquet aujourd’hui et il faut avoir comme nous la promenade chevillée au corps pour sortir par ce vent froid. Sans compter que le soleil se cache et qu’il va peut-être pleuvoir. À propos, Kesler a envoyé ce matin les sculptures de la dame mais je n’ai pas encore eu la curiosité de les regarder. On les défera devant lui ce soir à moins que tu ne désires les voir auparavant. Est-ce que Mme Chenay lira ce soir [1] ? Il me semble qu’il n’y a pas dans ce qui reste à lire de quoi occuper une soirée. Après cela tu feras ce que tu voudras et ce que je t’en dis n’est que pour épargner un dérangement à ta petite belle-sœur sans grande utilité. Quant à moi pourvu que je sois avec toi, je jujubile.
BnF, Mss, NAF 16385, f. 227
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Florence Naugrette
a) « au dépend ».
b) « rattrapper ».