Paris, 6 avril [18]72, samedi matin, 8 h.
Temps froid, cœur chaud, voilà mon bulletin météorologique ce matin. Comment la nuit, mon grand petit homme ? La mienne couci-couça mais ça n’a aucune importance tant que tu continueras à te bien porter et à m’aimer. J’ai hâte de savoir des nouvelles du pauvre Petit Georges [1]. J’espère qu’il n’aura pas trop toussé cette nuit et que ses saignements de nez ne se seront pas reproduits car ces pertes de sang si fréquentes finiraient par l’affaiblir tout à fait. Jusqu’à présent il n’y a rien de sérieux pour Petite Jeanne. Heureusement pour sa petite constitution si délicate et si fragile. Quant à Mariette elle n’a plus que la maladie des convalescents c’est-à-dire les yeux plus grands que le ventre. Je viens de lui envoyer deux œufs mollets en attendant que le bouillon soit fait. Tout à l’heure je m’occuperai du jour et de l’heure du départ d’Henriette et je réglerai son compte de voyage. Je pense que nous n’avons personne à dîner ce soir, ce qui nous permettra de laisser un peu reposer notre gargotterie. Je te prie de penser à donner à Suzanne l’épilogue [2] pour que je le copie tout de suite. Je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16393, f. 93
Transcription de Guy Rosa