Paris, 14 mai [18]78, mardi matin, 10 h.
Cher bien-aimé, j’envoie Mariette pour te rappeler ton rendez-vous avec ta princesse [1]. Tu vois, d’après cette attention, dans quelle bonne disposition de caniche je suis ce matin ? Je rapporte tout à mon maître les princesses, les cocottes et autres comestibles à l’usage des grands hommes… de bon appétit comme toi. J’aurais voulu te plaindre hier d’être forcé de te coucher avant ta journée finie mais comme je ne pouvais que gagner à cet écourtement de la soirée et que je n’avais rien fait pour cela j’ai eu la lâcheté de m’en réjouir ce qui ne m’a pas empêchéea d’avoir d’affreux cauchemarsb de toutes les couleurs toute la nuit. Ça m’apprendra à rire de vos déconvenues galantes. C’est bien fait ! Je ne pense pas que nous puissions sortir aujourd’hui, surtout si tu vas au Sénat, car le temps est bien mauvais et presque froid. Cependant mes douleurs, loin d’augmenter, tendent à diminuer en ce moment. Encore quelques jours de patience et je pourrai me tenir sur mes quatre pattes sans trop de souffrance. En attendant je t’aime dans toutes les attitudes de l’adoration et de l’admiration.
BnF, Mss, NAF, 16399, f. 126
Transcription de Chantal Brière
a) « empêché ».
b) « cauchemards ».