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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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1er décembre 1856

Guernesey, 1er décembre 1856, lundi soir, 4 h.

Cher bien-aimé, vous voyez que je ne me fais pas tirer l’oreille pour faire une grande restitus. Tiens, voilà le citoyen Kesler, je finirai tout à l’heure.
5 h. ¼. De Kesler en Préveraud, de Préveraud en stéréoscope et de blanchisseuse en aiguille, voilà plus d’une heure de retard entre ma plume et mon cœur. Malheureusement, tes ouvriers me laissent tout le temps de gribouiller en t’attendant. Et quant à l’INSPIRATION, elle ne me fait jamais défaut, comme vous savez ! Ah ! que je vous VOUEILLE dire le contraire et vous aurez affaire à mon style. À propos de STYLE, c’est encore moi qui ferai les frais de lecture du jeune Victor [1] ce soir, pour peu que cet [illis.] fasse le tour de la famille. Je ne risquerai que de me [retirer ?] sur la quantité et de crever de bonheur rentré avant la fin de ces soirées littéraires. Du reste, je ne GEULE avec cette véhémence après toute cette rambouilleterie que parce que je ne peux pas en prendre ma part et surtout parce que cela me rogne mes pauvres petits soirs d’autant de plaisir d’être avec toi. Après cela, mon grand bien-aimé, je comprends de quel intérêt sont pour toi les travaux d’esprit de tes braves enfants et je m’associe de tout cœur à leur succès qui est ton orgueil et ta joie. Aussi, mon adoré, je me dévoue avec courage et avec amour à leur petit triomphe intime. Pan, pan, pan, pan, pan, qu’est-ce qu’est là ? Pis, pik, piff… Hélas, il n’y a déjà plus ni pis, ni pikk, ni piff, je suis encore plus seule, si possible, puisque je n’ai même plus l’espoir de vous revoir ce soir. Et dire que toutes mes restitus sont employées depuis un bout de l’année jusqu’à l’autre à constater jour par jour ma déception, ma mystification et ma désolation, c’est vraiment bien la peine d’enregistrer tout cet ennui avec tant de soin. Taisez-vous et rendez-moi mes dessins, mes photographies, mes manuscrits, ma faïence, mes bibelots, et le reste, grand voleur que vous êtes, mais ne comptez plus sur ma ferrure splendide car tu ne l’auras pas, ni par mer, ni par terre, ni par trahison. Telle est ma vengeance raffinée et passée au tamis de [plusieurs mots illisibles] Que ne puis-je passer de même mon bête d’amour.

Juju

Bnf, Mss, NAF 16377, f. 271
Transcription de Mélanie Leclère, assistée de Florence Naugrette

Notes

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