1er septembre [1838], samedi, 2 h. après-midi
Mon cher petit galant, je viens de terminer mes comptes et j’y ai trouvé un déficit à mon avantage de 8 francs 13 sous ½ ! J’aurais pu en faire mon profit et les mettre dans mon escarcelle mais je suis honnête et PAUVRE. D’ailleurs vous m’avez apporté un bouquet qui vaut plus que ça donc je n’ai fait que mon devoir. Je vous aime, mon petit homme, vous n’avez pas l’air de vous en douter mais c’est pourtanta bien vrai. Je passe ma vie à vous désirer quand vous n’y êtes pas et mes forces et mon ÂME à vous admirer et à vous adorer quand vous y êtes. Enfin, je suis une pauvre vieille Juju perdue et confite dans son amour comme le crapaud de l’apothicaire de La Ferté [1] dans son bocal. Jour pa, jour To. Il faut bien rire, tiens, y a pas beaucoup de joie quand vous n’y êtes pas et si ce n’était l’espoir d’une bonne petite nuit ce soir, je pousserais d’affreux beuglements. Papa était bien I tout à l’heure, ça m’inquiète, je n’aime pas qu’on soit si i quand on a une pièce en répétition [2]. Je vais faire repasser mon grand couteau et puis nous verrons. En attendant, je lèche vos pieds comme un pauvre chien fidèle que je suis.
BnF, Mss, NAF 16335, f. 191-192
Transcription d’Élodie Congar assistée de Gérard Pouchain
[Blewer]
a) « pour tant ».