Paris, 3 juillet [18]77, mardi matin, 10 h.
Merci, mon grand petit homme, au nom de tout le monde en général et du mien en tout tendrement particulier, de la petite fête que tu nous a donnée hier, un peu écourtée par le retard de Mmes Lockroy et Ménard mais bien charmante par la joie effarée de nos chers petits devant les clowneries cocassement bariolées et la haute et forte voltige des trapéziennes de primo cartello [1]. Quelle souplesse et quelle grâce chez l’une, quels reins et quelle mâchoire chez l’autre ! Je plains le vivant qu’elle prend aux dents. Au moins chez le cheval ce n’est que le mors… pardon, je ne le ferai plus [2].
Le temps maussade hier est redevenu beau aujourd’hui comme pour nous narguer et nous n’aurons pas les petits enfants ce soir. Voilà pourquoi les bonheurs, comme les jours, se suivent et ne se ressemblent pas. Contentons-nous de ce que Dieu nous donne et aimons-nous de tout notre cœur et de toute notre âme en attendant la félicité souveraine et éternelle que nous espérons. Je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16398, f. 178
Transcription de Guy Rosa