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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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8 juin [1847], mardi matin, 8 h. ½

Bonjour, vilain, bonjour, menteur, bonjour, scélérat, bonjour. Je n’ai plus de confiance dans vos promesses et encore moins dans nos RELIQUES. Je vous renie pour un honnête homme. Après cela vous êtes si enrhumé que je ne peux pas trop vous en vouloir, et puis l’odeur de la peinture vous aurait peut-être fait du mal [1]. Je vois que les circonstances atténuantes vont m’amener petit à petit à vous avoir une RECONNAISSANCE infinie de n’être pas venu depuis trois jours ! Ce que c’est que l’amour !!!a Voyons, décidément, où en êtes-vous de votre rhume ? Faut-il que je sois la plus tendre des femmes ou la plus féroce des Juju ? Êtes-vous le plus morveux des académiciens ou le plus traître des pairs de France ? Répondez si tu peux et choisis si tu l’oses.
Du reste, moi qui ne me plains pas, je ne suis pourtant pas à la noce. Ma tête et ma gorge en savent quelque chose. Cette odeur de peinture me donne une sorte d’ivresse douloureuse qui me fait beaucoup souffrir. Heureusement que le plus fort est passé et que dans deux ou trois jours il n’y paraîtra plus. Malheureusement, mon amour est plus tenace et vous ne le savez que trop.

Juliette

Leeds, BC MS 19c Drouet/1847/36
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen

a) Il y a trois points de suspension.


8 juin [1847], mardi matin, 10 h. ¾

Je pense que vous avez Académie aujourd’hui, et j’espère aller vous y chercher avec ou sans votre permission. Vous pensez bien que je ne compterai plus sur vos promesses si ce n’est pour être bien sûre que vous ne les tiendrez pas. J’irai donc vous chercher tantôt, quelque temps qu’il fasse et quoi qu’ila arrive et que vous en disiez. ATTRAPÉb ! Vous saurez que c’est aujourd’hui la Saint-Médard et qu’il ne faut pas plaisanter avec ce saint PLUVIEUX [2].
Je vous ai fait changer votre billet. J’aurais mieux aimé vous le changer à ma façon mais vous n’entendez pas assez la plaisanterie pour que je me livre à mon inspiration. Aussi vous trouverez votre grenouille [3] intacte quand vous viendrez.
J’ai eu 2 reconnaissances à renouvelerc hier. Je vais avoir aujourd’hui des balais, des plumeaux et des éponges à acheter, sans préjudice des 95 F. que je dois à Suzanne.
Je vous écris toutes ces choses puisque vous ne prenez pas le temps de les entendre, et je vous baise en pattes de mouches puisque vous vous refusez à toute autre caresse plus significative.

Juliette

Leeds, BC MS 19c Drouet/1847/37
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen

a) « quoi que il ».
b) « ATTRAPPÉ ».
c) « renouveller ».

Notes

[1« Il y a des maçons qui travaillent au rez-de-chaussée du no 12 de la rue Sainte-Anastase. » (Victor Hugo, Journal de ce que j’apprends chaque jour, 5 juin 1847.) Juliette s’en plaint depuis quelques jours.

[2On associe à ce saint fêté le 8 juin ce célèbre dicton : « S’il pleut à la Saint-Médard, il pleut quarante jours plus tard ». Juliette le cite souvent.

[3Familier : tirelire.

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