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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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21 septembre [1845], dimanche matin, 9 h. ½

Bonjour, bien-aimé, bonjour, adoré petit Toto, bonjour, je suis contente, je vais te voir tout à l’heure. Hier je ne l’espérais pas du tout. Je pensais que tu m’avais fait cette promesse pour me faire prendre patience et voilà tout. Aussi je m’étais couchée fort maussadement et endormie de même lorsque tu es venu me surprendre. Seulement je regrette toujours que tu ne me donnes pas le temps de me réveiller. Cependant je n’ai pas d’autres occasionsa de te voir que celles-là et Dieu sait si je soupire après. Une autre fois il ne faudra pas t’en aller que je ne sois parfaitement réveillée. Tu sais que ma fillette devait aller chez M. Dumouchel ce matin mais comme le guignon ne nous quitte jamais, nous avons reçu une lettre du susdit ce matin qui nous mande que sa femme est accouchée et qu’il ne pourra pas recevoir Claire. L’ennuyeux de tout cela, c’est que rien n’avance et que je dérange cette pauvre Eulalie à qui je paie des omnibus pour rien. Les voici justement qui reviennent de la messe. Je vais les faire déjeuner tout de suite afin de renvoyer ..........b

11 h. ¼ du soir

Cher adoré, j’ai été interrompue à cet endroit de mon gribouillis par ta ravissante petite personne. Depuis je n’ai pas eu une minute pour le finir. Maintenant que je suis seule, je me hâte de venir te baiser et te dire que tu es mon Victor bien-aimé que je baise et que j’adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16360, f. 306-307
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « d’autre occasions ».
b) Dix points courent jusqu’au bout de la ligne.


21 septembre [1845], dimanche soir, 11 h. ½

Bonsoir, Toto, bonsoir, mon cher petit o, j’espère que vous êtes couché et endormi depuis longtemps ? Les baigneuses sont rentrées depuis longtemps et je ne sachea pas que vous ayez des somnambules dans votre voisinage. Dormez donc, mon cher petit bien-aimé, et prenez garde aux rêves que vous ferez, car je vous préviens que je suis jalouse, même des rêves. Mon Toto chéri, bonsoir, je regarde mon pauvre lit vide en soupirant avec regret et je me dis qu’autrefois vous ne l’auriez pas laissé avec cette impertinente confiance. Hélas ! autrefois, autre Toto ! Quant à moi, j’ai eu la bêtise de ne pas changer de système et de vous adorer comme le premier jour, c’est fort bête mais cela est ainsi. Si jamais je reprends mon cœur de vos griffes, je sais bien ce que j’en ferai. En attendant, puisqu’il y est, qu’il y reste. Tâchez seulement de ne pas trop le faire souffrir.
Je t’écris bien tard, mon Toto, parce que mon monde est parti à 10 h. ½. Il m’a fallu me déshabiller et compter la dépense, ce qui m’a menée jusqu’à l’heure où je t’écris. Mais toi, mon petit homme chéri, tu dois être endormi depuis longtemps à moins que la férocité de tes matelas ne s’y oppose ? Si tu avais voulu, je t’aurais prêté les miens et moi par-dessus le marché. Il me semble que cela aurait mieux valu que les espèces de têtes de clous sur lesquellesb tu couches. Enfin tu ne l’as pas voulu puisque tu leur as donné la préférence et ma dignité me dit que je ne dois pas insister sur cet objet, ce qui fait que je te souhaite le bonsoir tout bonnement, avec des millions de baisers.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16360, f. 308-309
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « je ne saches ».
b) « sur lesquels ».

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