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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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13 avril [1845], dimanche matin, 11 h. ½

Bonjour, mon Toto, bonjour, mon cher amour bien aimé, bonjour, mon petit homme chétif, bonjour, le plus mignon et le plus délicat des Toto, bonjour, je vous aime. Je voudrais être à mardi [1]. Plus le moment approche et plus je suis impatiente. Cette chose a déjà tant traîné qu’elle en est devenue fatigantea et irritante au dernier point. S’il y avait encore un retard, je suis capable d’aller leur fiche des sottises pour mon propre compte. Je serai bien soulagée le jour où ce sera fini, fini et archi fini. En attendant, je vous fais faire par force ce que vous auriez fait autrefois par plaisir. Mais j’en ai pris mon parti maintenant. J’ai reconnu qu’il n’y avait que les HONTEUSES qui perdaient et je ne veux plus avoir de honte, AU CONTRAIRE. Dites donc, il faudra demander à Varin si c’est votre DUMOUCHEL parce qu’alors vous lui écrirez, si c’est lui. Tandis que si ce n’est pas le Dumouchel de Varin, il est inutile que vous lui écriviez. Il faut pour cela demander à Varin si c’est bien votre Dumouchel pour ne pas avoir le désagrément d’écrire à un Dumouchel qui ne serait pas celui de Varin. Voime, voime, pôlisson. Que je vous voie encore vous moquer de ce pauvre Varin à propos de son Dumouchel et vous verrez ce que je vous ferai.
Avouez, mon amour, que vous avez été pris dans un fameux traquenard cette nuit et que vous avez été horriblement mystifié. De mon côté, j’avouerai que vous vous êtes conduit très galamment et qu’il est impossible de faire une meilleure mine à plus mauvais jeu. Vous êtes un vaillant. Baisez-moi, je vous adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16359, f. 49-50
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « fatiguante ».


13 avril [1845], dimanche après-midi, 1 h. ¾

Je vous aime, vous, et je serais la plus heureuse des Juju si vous veniez une pauvre petite minute du bon Dieu, le temps seulement de baigner vos yeux et de recevoir un baiser. Mais vous n’êtes pas si bête, vous aimez mieux vous informer si le Dumouchel de Varin est notre Dumouchel. Comme s’il pouvait y avoir deux Dumouchel dans le monde pour un seul Varin. Taisez-vous, car je vous dirais des gros mots et vous savez qu’au gros maux, les gros remèdes. Je me tais pour ne pas vous humilier, mais je n’en pense pas moins. Il fait un temps de chien. Je ne sais pas comment tu peux avoir le courage d’errer par la grêle, le vent et la pluie qu’ila fait. Si j’étais à votre place, je me donnerais la préférence. J’aimerais mieux être au coin du feu de Juju, exposé à toutes les giboulées et à toutes les furies et à tous les déchaînementsb de son amour que de recevoir des tas d’eau sur ma pauvre carcasse. Il est vrai que c’est à mon point de vue que je parle, peut-être que si j’étais au vôtre et que vous fussiez au mien, j’agirais comme vous et que je prendrais le plus vif intérêt au Dumouchel de Varin. Je ne sais pas quand je te verrai, mon amour, mais je sais combien je te désire et comment je t’aime. En attendant que tu viennes, je m’occupe de toi, je pense à toi, je suis avec toi.
Clairette étudie son piano, son fameux piano que j’ai fait ouvrir ce matin. Moi, je vais m’habiller dans le cas où les autres petites péronnelles viendraient dîner avec elle. Baise-moi et viens tout de suite.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16359, f. 51-52
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « qui ».
b) « les déchaînement ».

Notes

[1Juliette souhaite-t-elle être « à mardi » pour que les désagréments de l’attente concernant la nomination de Victor Hugo à la Chambre des pairs soient terminés ?

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