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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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7 février [1844], mercredi matin, 10 h.

Bonjour, mon Toto bien aimé, bonjour, mon cher adoré, bonjour mon bon petit homme. Bonjour, comment vas-tu ? Comment la petite petite équipée d’hier a-t-elle réussi ? A-t-elle produit un aussi bon effet que l’air frais ? Si cela était je vous invite à recommencer le plus tôt possible pour vous d’abord et pour moi qui n’ai guère profitéa de l’occasion cette fois-ci. J’étais tellement préoccupéeb de la pensée que tu ne m’aimais plus comme autrefois, mon Toto, que j’ai perdu le meilleur de la petite soirée que tu m’as donnée hier. J’espère me rabibocher bientôt. Je vous prendrai de force s’il le faut. Je suis capable de tout pour rentrer dans la pleine et entière possession de votre personne et de tout ce qu’elle contient. Je ferai bien, n’est-ce pas mon Toto ?
Pauvre Charlot, je pense à lui depuis hier. Il faut bien donner son Vieux Consul [1] à ce pauvre enfant. C’est bien le moins après l’affreux tour que tu lui as fait hier. Je vote pour qu’on lui accorde tous les vieux consuls de tous les [poux ?] qui grouillent à l’Odéon et ailleurs. Il faut prendre son cœur par autrui et faire à ce pauvre Charlot ce que nous voudrions qu’on nous fît en pareil cas. Sans préjudice de la morale et de la discipline, bien entendu.
Je ne te demanderai pas à sortir aujourd’hui parce qu’il fait trop vilain. Demain encore moins car ta journée toutc entière suffira à peine pour faire tout ce que tu as à faire. Je tâche d’avoir du courage, de la patience et de la résignation d’avance et puis je t’aime de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16354, f. 145-146
Transcription de Chadia Messaoudi assistée de Chantal Brière et Florence Naugrette

a) « profiter ».
b) « préocupée ».
c) « toute ».


7 février [1844], mercredi soir, 6 h. ¾

Vous voyez bien, vieux menteur, que vous rentriez chez vous et vous avez eu le front de me dire que vous alliez marcher pour vos yeux ! Tout cela pour me quitter plus vite. Vous êtes un vilain être décidément et je vous changerai contre quelque chose de plus drôle. Si tu pouvais penser à m’apporter ces paquets pour les Lanvin, cela leur rendrait un fameux service. Ces pauvres gens-là tirent la langue un peu sur tout et tout ce qui leur arrive en ce genre est reçu avec enthousiasme.
Je voudrais bien aussi que l’occasion se présentât de reparler encore une fois à Villemain de ce malheureux vieillard [2]. Je t’écris cela, mon cher adoré, non pas que je doute de ta bonne volonté et de ta bonté, mais parce qu’occupé comme tu l’es, cela doit nécessairement te sortir de la tête. Si je t’ennuie, défends-le-moi et je serai plus discrète dans mes sollicitations de toutes sortes.
Eh bien notre infortuné Charlot a-t-il obtenu ce qu’il désirait [3] ? Si cela est, il doit être déjà à son poste. Je vous défends de l’y suivre. Vous me feriez un gros chagrin si vous alliez au théâtre sans moi et je crois que ce pauvre Charlot ne tient pas à votre paternelle compagnie ce soir. Vous devriez profiter de cela pour venir recommencer la partie d’hier. Je crois que je suis en veine de la gagner et bien d’autres encore avec elle. En attendant, je vous aime trop.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16354, f. 147-148
Transcription de Chadia Messaoudi assistée de Chantal Brière et Florence Naugrette

Notes

[1La tragédie d’Arthur Ponroy, Le Vieux Consul, a été créée le 10 février 1844 au théâtre de l’Odéon.

[2À élucider.

[3Dans sa lettre du matin Juliette demandait à Victor Hugo d’accorder la permission à son fils Charles d’assister à une représentation du Vieux Consul, tragédie jouée au théâtre de l’Odéon.

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