19 septembre, mardi matin, 9 h. 1/2
Bonjour mon cher petit homme chéri, bonjour mon pauvre petit bien-aimé, bonjour, je t’aime. Comment vas-tu ce matin mon cher petit ? Quand reprendras-tu tes bonnes habitudes avec moi mon cher adoré ? C’est bien triste de te voir, mon Toto, de te savoir malheureux loin de moi. Tu as beau me dire des paroles de bonté et de douceur, il n’en est pas moins vrai que tu ne viens que quelques moments le soir auprès de moi si tu y trouvais quelque consolation, tu y viendrais plus souvent mon pauvre amour, c’est bien sûr et je n’aurais pas la double tristesse qui vient de ton chagrin et de mon impuissance à l’adoucir [1].
Je rêve continuellement de toi et de toute la maison mon cher adoré. Ce sont des rêves bien douloureux, mon pauvre petit homme, et qui ne me reposent pas de la triste préoccupation de la journée. J’aurais bien besoin de te sentir auprès de moi pour me tranquilliser mon cher petit homme. Hélas ! Je prévois que la journée va se passer comme toutes les autres, à t’attendre, et j’en ai le cœur lourd d’avance.
Je sais bien mon pauvre petit que tu ne sors pas et que tu ne reçois personne. Mais je sens bien que si tu m’aimais, tu trouverais de la douceur à venir auprès de moi dans le moment où tu souffres et où tu es le plus triste et le plus malheureux des pères. Je ne veux pas te tourmenter mon cher bien-aimé, encore moins avoir des exigences dans ce douloureux moment, mon pauvre petit, et pourvu que tu trouves quelques consolations à ton affreux chagrin, je bénirai le bon Dieu et je me résignerai à te désirer et à t’adorer de loin.
Prends soin de toi, mon cher bien-aimé ! Tâche de ne pas tomber malade. Pense à moi su tu peux et aime-moi pour que je vive. Ton amour, c’est ma vie mon Toto. Je ne pourrais pas plus vivre sans toi qu’on ne peut vivre sans respirer.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16352, f. 127-128
Transcription d’Olivia Paploray assistée de Florence Naugrette